Depuis quelques années, la législation antidiscrimination s'est considérablement étoffée. De nouveaux motifs de discrimination ne cessent de s'ajouter à la liste, la charge de la preuve a été déplacée vers l'employeur et la durée des périodes de protection, ainsi que les montants des indemnités à payer en cas de violation, ont doublé dans certains cas. La législation introduit aussi une autre nouveauté : la reconnaissance légale de la discrimination multiple permettant le cumul des indemnités.
Auparavant, le cumul des indemnités de protection avec d'autres indemnisations était plutôt l'exception que la règle. Il était rare qu'un travailleur en mesure de prouver plusieurs discriminations distinctes reçoive également plusieurs indemnités à cet égard. La législation en la matière n'était pas tout à fait claire. La modification de la loi en 2023 apporte un changement et reconnaît pour la première fois la discrimination par association, fondée sur un critère supposé ou multiple. Il s'agit de trois notions distinctes :
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Discrimination par association : une personne est discriminée en raison d'un lien de parenté étroit avec une personne qui jouit d'un critère de protection. Par exemple, un travailleur ayant un enfant handicapé qui s'absente plus souvent.
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Discrimination fondée sur un critère supposé : une personne est discriminée sur la base d'un critère dont elle ne jouit pas mais qui lui est attribué, par exemple, parce qu'elle participe à un événement LGBTQIA+.
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Discrimination multiple : il s'agit des cas où une personne est victime d'une inégalité injustifiée sur la base de plusieurs critères protégés. Par exemple, un homme d'une quarantaine d'années qui échoue à la procédure de sélection parce qu'il ne s'intégrerait pas dans l'équipe composée uniquement de femmes d'une vingtaine d'années.
En cas de discrimination multiple, la nouvelle législation stipule que le motif de discrimination donnant droit à l'indemnisation la plus élevée s'applique toujours. Parallèlement, on observe également une tendance croissante dans la jurisprudence à cumuler des indemnités de protection avec d'autres indemnisations. À cet égard, voici un exemple frappant extrait d'un arrêt de 2024. Dans cette affaire, une travailleuse qui venait d'accoucher et qui avait présenté un certificat médical pour maladie consécutivement à son repos de maternité a été licenciée.
La travailleuse concernée a réclamé une triple indemnisation :
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Indemnité forfaitaire de 6 mois de salaire pour la protection pendant le repos de maternité et jusqu'à 1 mois après celui-ci ;
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Indemnité forfaitaire de 6 mois de salaire pour discrimination fondée sur le genre ;
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Indemnité forfaitaire de 6 mois de salaire en raison d'une discrimination pour des motifs médicaux.
L'employeur ayant invoqué des raisons économiques pour justifier le licenciement n'a pas pu prouver que le licenciement était indépendant des critères de protection susmentionnés et il a effectivement été condamné à payer des indemnités équivalant à 18 mois de salaire.
Par conséquent, bien que le nouvel accord de gouvernement semble déjà vouloir limiter ces cumuls, la prudence est de mise lorsque vous souhaitez licencier un travailleur pour lequel des motifs de protection sont susceptibles d'être invoqués.